Mode & Beauté

Interview: Hélène de la Moureyre, créatrice de bilum

Introduction

 

 

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1. La naissance de bilum

MarcelGreen.com : Comment t’est venue la fibre Green ?

HDLM : Je porte ça en moi depuis l’enfance, sans forcément le savoir. Je suis la 4ème d’une famille de 5 enfants et par principe, on jetait rarement à la maison et surtout pas de nourriture ! Je récupérais les fringues de mes frères et sœurs qui étaient au dessus de moi.

On faisait les choses avec bon sens. Je me souviens de ma mère qui faisait déjà le tri du verre, c’était il y a 20 ans ! Elle le faisait par conviction écologique, mais aussi pour éviter que les éboueurs se coupent… Je me rappelle aussi d’une phrase de mon père alors qu’il mangeait une poire à table « Ça y est les poires n’ont plus goût de poire ». Ça voulait dire que c’était la fin de la saison des poires et qu’on n'en mangerait plus avant l’année suivante.

Finalement, il y avait plus de logique avant, quand on avait pas encore complètement conscience du problème. On était écolo par bon sens, maintenant on l’est par obligation.

L’eau est un bon exemple. C’est quand même absurde de la laisser couler pour rien en toute circonstance ! C’est un de mes petits combats, ça m’est arrivé de me lever dans un café pour aller éteindre un robinet derrière le bar.

MG : Comment as-tu fait le lien avec bilum ?

HDLM : Le lien vient sans doute de mon attirance pour la récup. On faisait souvent les marchés, les brocantes avec mon père et entre 16 et 20 ans j’ai passé tous mes weekends à ne faire que ça. Donc chez moi tout est retapé !

Ensuite j’ai travaillé pendant 7 ans dans la pub et l’évènementiel. J’ai adoré. J’étais chez Carat Event, une grosse agence d’achat média, dans la filiale évènementielle. J’avais accès à des budgets prestigieux et je m’occupais de toutes les opérations spectaculaires, dans des gares, dans des musées, des avenues… tout ce qui nécessitait des bâches géantes. 

J’ai quitté cette boite il y a 5 ans parce que j’avais envie de faire autre chose. Je me voyais bien créer des produits ou ouvrir une galerie… Et puis je suis tombé sur un sac fait à partir de matériaux recyclés. J’ai eu un vrai coup de cœur et je me suis dis qu’avec tout ce que je voyais passer comme bâches, je pouvais essayer de les utiliser pour créer mes propres sacs !

L’intérêt de la bâche géante c’est que ça donne des trucs sur-dimensionnés. Tu pars d’une image, un visuel, une photo ou un texte qui est tout à fait lisible quand tu as du recul… mais quand tu l’as devant toi, ça déforme le visuel et ça donne des résultats assez dingues.

Au départ, je n’avais pas forcément l’intention de créer une boite, j’ai récupéré une vieille machine à coudre chez un ami, quelques morceaux de bâches, et j’ai attaqué. Mon premier sac fut un Bizace, qui est toujours un de nos produits phares.

Et puis de fil en aiguille je me suis décidée à lancer quelque chose de plus abouti. Personne ne faisait la même chose à l’époque mis à part une société Suisse, pour laquelle j’ai énormément de respect, et qui fait des sacs à partir de bâches de camion.

Pour la fabrication je tenais absolument à avoir un atelier proche de paris. Je voulais pouvoir voir les gens, et encore maintenant, j’aime m’asseoir à côté d’une couturière de bilum, regarder comment elle fait, et discuter avec elle de la fabrication.

C’est comme ça que l’aventure bilum a commencé, petit à petit, autour d’un matériau et d’une envie.

MG : Que signifie Bilum exactement ?

HDLM : Ca veut dire « sac » en Papou. A l’époque ou je travaillais sur mes premiers sacs, j’ai visité l’exposition « Le Cas du Sac » au musée des Arts décoratifs. L’expo retraçait l’histoire du sac dans le monde. Je l'ai trouvée remarquable et j’y ai vu pour la première fois un sac papou, en matière végétale. Le « cartouche » indiquait « Bilum Papou, sac mixte, l’un des premiers véritables sacs au monde ». C’était le mix parfait : un sac personnalisé donc unique, résistant,  mixte… je tenais mon nom de sac !


2. La fabrication des sacs bilum

MG : Quel est le cycle de vie d’un Bilum ? Comment transformes-tu une bâche en sac?

HDLM : Le cycle de vie d’un Bilum est assez complexe car il y a de nombreux acteurs.

On commence par récupérer la bâche la où elle a été déposée après son utilisation, dans un entrepôt ou parfois même dans une décharge. Ensuite on la stocke dans un grand entrepôt où on la déploie complètement et on se ballade dessus avec nos patrons, pour choisir les meilleurs morceaux. A titre d’exemple, pour faire un Minibil il faut 8 morceaux de bâches différents. On découpe chaque morceau à la main, pièce par pièce, pour constituer le puzzle du futur sac.

Ensuite on emmène toutes les pièces dans une association d’insertion sociale qui se situe à quelques kilomètres de Paris. Cette association nettoie les pièces une par une, à l’éponge, avec des lessives écologiques. C’est comme des minis nappes à nettoyer…

En parallèle, on récupère des ceintures de sécurité de voitures qui vont servir d’anses pour les sacs. Pendant 2 ans, je suis allée les chercher directement dans les casses, aujourd’hui ils nous connaissent bien et nous envoient directement des cartons entiers de ceintures récupérées… Après avoir été triées, les ceintures sont nettoyées une par une dans un autre Centre d’Aide par le Travail qui emploie des personnes handicapées.

Ensuite l’ensemble des pièces est envoyé dans un des 4 centres qui redécoupent toute les bâches à l’emporte pièce. On est obligé de passer par cette étape car chaque pièce est unique. Enfin, ce sont des ateliers spécialisés dans la bagagerie et le travail du cuir qui regroupent le tout pour assembler le sac. 


MG : Peut-on considérer les sacs bilum comme des oeuvres d'art?

HDLM : Ouh la ! J’adorerais, mais je ne crois pas qu’on puisse y prétendre.

Cela dit, il nous est arrivé de travailler sur des bâches issues de créations artistiques. Ça a été le cas, par exemple, avec Agnès B, qui imprime des photos qu’elle fait sur des bâches géantes qui servent de décors dans ses boutiques du monde entier. Nous avons créé avec elle des collections de sacs à partir de ces bâches qui sont des œuvres d'art. Nous avons reproduit l’expérience avec l’exposition Roy Lichtenstein de la Pinacothèque de Paris. Dans ces cas particuliers, il est vrai que l’on travaille une matière artistique.

En revanche, ce qui est sûr, c’est que chaque Bilum est complètement unique. Je garantis à quiconque qui achète un Bilum qu’il ne croisera personne avec le même dans la rue !

MG : Quelles sont les nouveautés de Bilum pour cette année ?

HDLM : On est en train de travailler sur de nouvelles matières comme on l’avait fait avec la toile pour Agnès B. Je vous réserve pas mal de surprise d’ici la fin de l’année.


3. Hélène et la planète "Green"

MG : Au jour le jour, tu es une ambassadrice écolo… comment t'y prends-tu pour convaincre les plus réticents ?

HDLM : J’essaie rarement de les convaincre… Je crois que ca doit être une prise de conscience personnelle. On a tous accès à l’information, on est tous capable de la comprendre. Ceux qui continuent à l’ignorer, soient ils sont inconscients, soit ce sont de gros égoïstes qui se disent « après moi le déluge ». Je n’ai pas envie de me battre contre eux…

En ce qui concerne bilum, je considère que le produit doit convaincre avant la cause. Quand on a commencé à vendre au Printemps, les responsables du magasin me disaient que les gens achetaient souvent sans prêter attention à l’étiquette et à l’éthique du produit… c’est une manière de faire avancer la cause…

MG : Quelles sont tes marques vertes préférées ?

HDLM : J’aime beaucoup LeAF, Veja évidemment. J’aime aussi beaucoup ce que font les Fées de Bengales, ou les Racines du Ciel. Je trouve ca d’une grande finesse.

Mais je trouve réducteur de ne parler que de marques « Green ». Il y a aussi beaucoup de marques qu’on ne trouve pas dans les corner « Green » des salons et qui se bougent depuis longtemps. Agnès B, par exemple, est une femme qui a une vraie éthique dans son travail et qui l’a mise en œuvre bien avant que ca devienne aussi évident qu’aujourd’hui.

Mais ma véritable marque éthique préférée c’est Emmaüs J’achète très peu de neuf, je préfère la récup’. Ma dernière paire de chaussures par exemple, je l’ai récupérée dans une poubelle, c’est une superbe paire de Bailly des années 70. Elles avaient juste un trou en dessous, je les ai amené chez un cordonnier, il était fou de voir qu’on avait pu jeter ces chaussures.

Donc ma meilleure source de produits éthiques, c’est la « chine »… enfin la chine locale, celle des puces et des brocantes…

Sinon, j’essaie aussi de privilégier les marques de qualité qui fabriquent en Europe.

MG : Quelles sont les petites choses moins green dont tu n’arrives pas à te passer ?

HDLM : Mon scooter. Je fais beaucoup de vélo mais ça ne suffit pas pour me passer complètement de mon scooter. Quand je regarde les 2 clés le matin, j’ai du mal à résister… Surtout quand je suis à la bourre !

Après, je fais hyper gaffe aux fruits et légumes de saison, mais il y a certains fruits exotiques dont je n’arrive pas à me passer comme les bananes ou les mangues.

MG : Proust, Pagnol, Cerdan… Green, quel est ton marcel préféré ?

HDLM : Marcel Cerdan, qu’est-ce qu’il était beau dis-donc ! Je l’ai découvert récemment dans une boutique qui avait récupéré plein de vieux articles et photos de lui… Quel homme ! En vrai, l'idéal, ce serait Marcel Cerdan qui lit du Proust en photo sur MarcelGreen.com…

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